Timothée de Fombelle
« La souffrance est le seul charbon de cette machine tournant du matin au soir. (...) Et sans la peur, sans la peine, la colline serait une forêt vierge remplie d’oiseaux… »
Les années ont passé, cela fait maintenant quatre ans que Alma et les siens ont été séparés. Les six membres de la famille sont dispersés à travers le monde, de Paris à Saint Domingue en passant par le sud des Etats-Unis. Nous sommes en 1789, le peuple français gronde de colère contre la monarchie et c’est dans ce contexte que la jeune Oko persiste dans ses recherches. Lam n’est pas mort, elle le saurait, le sentirait, elle ne doit pas s’arrêter de chercher. Dans la capitale brûlée par la Révolution, sa route va croiser celles de personnages du passé, de Poussin à Saint-Ange, la faisant passer de la joie à la colère et la peur.
Au sud de Saint Domingue, la jeune Amélie Blassac exploite ses terres au maximum pour rembourser la dette qu’elle a contractée avec M; De Bellerive. Elle a deux ans pour s’acquitter d’une véritable fortune et son usurier a parié sur son échec. Il est approché par Saint-Ange qui n’y croit pas non plus et voit dans ce marché l’occasion de s’enrichir et de se rapprocher de celle qu’il aime (sans retour).
Dans cette nouvelle page de la quête, Alma passera par le Paris de la prise de la Bastille, par New-York où elle comprendra qu’elle doit continuer sa quête, par la Louisiane qui lui donnera les indices nécessaires pour enfin rejoindre Saint-Domingue où tout se règlera, espère-t-elle. Elle est loin de s’imaginer que l’île sera en pleine révolte au moment où elle y posera le pied et qu’elle devra à nouveau faire preuve de beaucoup de courage et d’intelligence pour se sortir du marasme du soulèvement.
« Elle veut sentir le manque, le creuser à nouveau. (...) C’est par ce vide, cette brûlure, qu’ils continuent à exister à l’intérieur d’elle, c’est par lui qu’ils reviendront un jour. Rien n’est plus vivant que ce qui manque.»
Troisième et dernier tome de la saga, cette Liberté, qui est la traduction du mot Alma en langue Oko, est celui d’un aboutissement tant dans les aventures de la jeune fille que dans l’Histoire de la traite négrière, qui reste le sujet sous-jacent de cette série. J’ai repris les CR des tomes précédents, car il s’est passé deux ans depuis que je les ai lus et je ne me souvenais plus de tout, mais l’esprit de révolte d’Alma, la soif de richesse de Saint-Ange, la volonté de s’en sortir d’Amélie étaient encore bien présents dans mon esprit. Il m’a fallu un peu de page pour me resituer mais j’ai vite été prise dans le rythme effréné de l’intrigue et je ne me suis pas ennuyée un seul instant.
Effectivement, il y a beaucoup de personnages, ce qui m’avait dérangée dans le premier tome, mais qui n’a pas été problématique ici car je savais qui était qui et faisait quoi. D’autre part, inscrire les aventures d’Alma et des siens dans la grande Histoire, de la Révolution Française à la révolte de Saint-Domingue est un merveilleux moyen de faire passer de grandes leçons et des repères chronologiques aux jeunes lecteurs à qui sont destinés ces romans.
J'ai entendu l’auteur dire que la littérature jeunesse avait plus de liberté que celle destinée aux adultes et cela se confirme : les ellipses, la pointe de magie (il en faut un peu), l’aspect ExtraOrdinaire de la quête et de son issue, il y a tout pour plaire aux ados et à leurs parents, férus d’Histoire et de littérature. Maintenant que ma fille a 14 ans, j’envisage plus facilement de lui mettre les trois ouvrages dans les mains car je sais qu’elle a la lucidité et la capacité de se repérer dans le temps et dans l’espace, qu’elle a les repères historiques pour ne pas être perdue et, mieux, qu’elle sera à même de se poser des questions et de laisser libre court à sa curiosité sur ces sujets passionnants que sont la traite négrière, le commerce triangulaire et les combats pour la fin de l’esclavage.
Je me sens grandie de cette lecture et suis même triste de devoir quitter Alma, Joseph, Amélie et tous les autres…
« Comme dans toutes les révolutions, ceux qui meurent sont parfois les plus coupables, parfois les moins débrouillards, parfois les plus courageux.»
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