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Anima

Wajdi Mouawad

Vous vous y connaissez en phobie ?

Pour ceux qui les subissent, vous savez à quel point c’est une souffrance, réelle. Parce que la phobie n’est pas simplement la peur, c’est la peur irraisonnée, irrationnelle, celle qui nous tétanise et nous empêche même de réfléchir. C’est une frayeur que l’on ressent physiquement, comme un courant glacial dans le sang et dans les membres, qui nous paralyse.


Voilà ce que je ressentais lorsque je voyais une araignée, il y a encore quelques années. Et puis j’ai lu Anima.

La femme du héros meurt, assassinée. Éventrée. Elle a subi une mort violente et atroce. Et le narrateur décide de mener l’enquête et de la venger, malgré les dangers, les mauvaises rencontres, les incertitudes. Voilà le pitch. Pas besoin d’aller beaucoup plus loin dans l’histoire.


Ce qui fait la particularité et la beauté de ce roman, c’est sa narration. Un roman choral d’une beauté et d’une originalité sans nulle autre pareil. Parce que ceux qui nous racontent l’enquête et les avancées du héros, ce sont les animaux qui l’entourent. Toutes sortent d’animaux : chats, rats, chien (volontairement au singulier) et, vous le voyez venir : araignées. Mammifères comme insectes, ces êtres disent ce qu’ils voient mais aussi ce qu’ils ressentent, comment ils se positionnent ou sont positionnés par rapports aux hommes, qui sont les véritables animaux sanglants de ce roman.


Les araignées narratrices m’ont permis de relativiser ma peur, de me rendre compte qu’elles ne sont pas dangereuses, qu’elles ne me veulent pas de mal, et que leur principale arme, c’est d’être moches (pour moi). L’écriture de Mouawad leur donne la parole, et en l’écoutant (ou en la lisant), j’ai eu l’impression d’apprendre à les connaître, à me rendre compte que la peur m’empêchait de raisonner et que si je me forçais un peu, si je prenais du recul, j’arriverais à relativiser et à ne plus être victime de cette phobie.


Aujourd’hui, les araignées ne sont peut-être pas mes meilleures amies mais elles ne sont pas non plus mes pires ennemies. Je ne hurle plus, je ne me fige plus, je passe mon chemin, je ne les tue plus (sauf si elles sont dans ma chambre à coucher, auquel cas je les fais chasser par mon super héros personnel, parce qu’il y a des limites à la cohabitation quand même).

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