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Cabane

Abel Quentin

« après une trop longue séparation, les souvenirs communs, au lieu de réunir les gens, dressaient entre eux une barrière invisible. »

Retrouvailles attendues avec Abel Quentin, deux ans après son voyant d’Etampes qui m’avait déjà fait bien réfléchir sur la problématique wikiste de la société actuelle. Autre roman, autre questionnement, autant d'intérêt ! 


« L’avenir des Etats-Unis dans deux ou dix ans (...) était une chose sérieuse. L’avenir du monde dans cent ans ne l’est pas. »

1972, université de Berkeley, Californie. Un éminent professeur d’économie, Stoddart, missionne 4 étudiants pour établir un rapport basé sur la dynamique des systèmes : l’idée est de faire une projection de l’avenir de la planète en prenant en compte la production, la consommation, la démographie et tout un tas d’autres critères. Le bilan est sans appel. L’humanité va droit dans le mur, se condamnant elle-même en condamnant la planète en même  temps. Mildred et Eugene Dundee, le couple américain, sont les porte-parole de ce Rapport 21 qui doit sensibiliser le plus grand nombre sur les risques encourus, tandis que Paul Quérillot, le Français, frustré, rentre au pays et s’engage auprès d’Elf, grand groupe pétrolier s’il en est, avant de lancer sa propre entreprise capitaliste au possible. Reste le norvégien, Gudsonn, mathématicien, qui disparaît après deux ans de professorat à l’université californienne. 

2023, Rudy est journaliste. Il est missionné pour écrire un article sur le fameux rapport à l’occasion de l’anniversaire de sa parution. A ce titre, il entame une enquête sur le scandinave, à la marge de ses anciens collègues. Alors que les autres ont fait carrière et sont restés - peu ou prou - sur le devant des scènes, lui n’a eu de cesse de fuir. Mais fuir quoi ? et pourquoi ? Au fur et à mesure qu’il suit les traces du scientifique, Rudy en apprend toujours sur ses obsessions et sur les risques encourus, les difficultés rencontrées et la folie du mathématicien et sa hantise de la suite de Fibonacci, source de toutes les catastrophes.   


« la vérité n'est-elle pas le seul combat qui vaille la peine d’être mené sans hésiter ? »

Résumer ce roman est un défi, à la hauteur de sa lecture. Parce que lire Abel Quentin, ça se mérite. Cet opus est exigeant, très exigeant. Il est intellectuellement stimulant, c’est le moins que l’on puisse dire, car il demande au lecteur une concentration et une disponibilité intenses pour comprendre qu’au-delà de l’enquête de Rudy, c’est un constat alarmant sur l’état de la planète, de l’humanité et l’omniprésence de concepts économiques et mathématiques dans la conception même du système capitaliste en place dans le monde. La surconsommation engendre une sur-pollution, qui entraîne elle-même des conséquences environnementales, des flux de réfugiés climatiques, des déchets encore et toujours… de manière exponentielle. Si rien n’est fait, c’est la condamnation du monde dans lequel nous vivons. 

J’ai reconnu des références à des théories et des ouvrages, notamment “Ravage” de Barjavel, avec la fin des machines qui entraînera la fin de l’humanité telle que nous la connaissons. J’ai ri - un peu - j’ai frémi et j’ai réfléchi, beaucoup. A titre individuel, aucune action ne peut avoir de conséquences : ce qui est nécessaire, c’est une prise de conscience et une action collective, à très très très grande échelle. Mais pour cela, il faut que chacun renonce à une part de son confort et l’homme (et la femme) est bien trop égoïste pour renoncer à ce ce que le progrès apporte de confort. 

Baignée (contre mon gré) dans des concepts économiques et mathématiques qui ont provoqué des maux de tête fréquents, je me suis tout de même énormément plu dans cette lecture, d’une intelligence pointue. Pas gourou pour un sou, mais un peu donneur de leçon, Abel Quentin nous invite à nous interroger et à questionner notre passé pour prendre soin de notre futur. 


« la mort est une discussion interrompue.  »

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