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Darwyne

Colin Niel

Roman de la rentrée littéraire 2022 que j’attendais avec impatience, j’ai pris un énorme plaisir à retrouver Niel dans un environnement diamétralement opposé à celui d’Entre Fauves, qui avait été le début d’une belle histoire entre le romancier et moi.


« Parce que les enfants, c’est comme les arbres, finalement, il ne faut pas les laisser pousser n’importe comment. »

Bois-Sec, bidonville à la lisière de la forêt amazonienne, Guyane Française.

Darwyne est un petit garçon de 10 ans différent. Avec ses petits pieds rentrés à l’intérieur, sa timidité, ses difficultés scolaires et son adoration pour sa mère. Un enfant différent, ne souffrant pas tant du regard du monde que de l’absence d’amour manifeste de sa maman. Cette dernière, très pieuse, est belle, inaccessible, sévère avec son fils comme elle ne l’a pas été avec sa fille aînée fait payer chaque jour au gamin sa différence, son handicap. Et puis elle enchaîne les amants. Les beaux-pères. Lorsque le huitième arrive dans leur vie, Darwyne sent tout de suite qu’il va falloir agir, comme pour les autres, se protéger, se cacher, s’adapter, et attendre que ça passe, comme à chaque fois.

Mathurine est éducatrice spécialisée dans un centre social d’aide à l’enfance. Il y a sept mois, un appel anonyme a fait une déclaration de situation inquiétante concernant la famille de Darwyne. Elle doit mener une enquête sociale. Elle doit faire son travail. C’est comme ça que les chemins vont se croiser, les liens se tisser, comme des lianes autour d’un tronc d’arbre. C’est par l’amour de la nature et de la forêt que l’éducatrice réussira à établir un contact de confiance avec le petit pian et lui permettre de réfléchir autrement, de changer de regard sur ce qu’il vit, sur ce qu’il est, sur sa mère et sur sa nature propre.


« … ici les étrangers, tout le monde les déteste. Et ce qui leur arrive, ça n’intéresse personne. Soit on est des parasites, soit on est des fantômes. »

Colin Niel m’avait déjà scotchée avec sa maîtrise des environnements pyrénéen et sud africain dans Entre Fauves. Dans ce nouveau roman, il nous plonge dans l’enfer de la Guyane en général, de la forêt amazonienne en particulier. Sa faune, sa flore, ses dangers, ses habitants. Et la manière de l’appréhender, de la comprendre, de l’observer et de l’aimer. Tout petit garçon qu’il est, Darwyne sent la forêt. Elle fait partie de lui autant qu’il fait partie d’elle, dans ses ressources comme dans ses périls. Les descriptions sont à couper le souffle, on ressent les vents, la chaleur, la pluie, au même titre que les émotions. La maîtrise du cadre est parfaite et on n’a qu’une envie : y aller, découvrir par nous-même cet environnement, paradisiaque ou infernal, selon comment on l’aborde.

Il y a par ailleurs une dimension sociale non négligeable avec une description de la misère de Cayenne très crue, très factuelle. Les bidonvilles, les difficultés des locaux comme des immigrés. La distance d’avec la France métropolitaine tant géographique que financière. Le manque de moyens et d’aides qui fait tout couler, ou plutôt laisse tout s’innonder, comme les quartiers pauvres à la saison des pluies.

C’est un roman fort, inclassable. Pas un polar, pas un thriller, pas de la littérature blanche non plus. C’est du Colin Niel, et je pense que ça veut tout dire…


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