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Débarquer

Hugo Boris

Bouleversée par Police, j’avais pourtant laissé filer Hugo Boris depuis. En voyant passer ce roman de la rentrée littéraire, je me suis dit qu’il était temps que l’on se retrouve.

« … ils doivent tous la ressentir, cette nécessité de revenir sur les lieux de la grande affaire de leur vie, avant qu'il ne soit trop tard. »

6 juin 1944. Sur les côtes normandes, les américains s’apprêtent à débarquer. Il fait froid, l’entraînement n’a pas été suffisant, il y a des conflits entre corps d’armée, mais tous les hommes sont prêts à partir. Andrew est de ceux-là. Malgré la peur, malgré le doute, malgré aussi cette attirance bizarre et dérangeante pour son barreur, Garnett. Dans le flot de soldats, dans une mer déchaînée, sous les tirs allemands, il gagne la plage, enfin. Se cache. Se sauve.

Aujourd'hui (ou à peu près), Magali est guide sur les lieux du Débarquement. Elle accompagne les touristes, les vétérans, les abreuvant d’Histoire et d’anecdotes sur l’issue de la Seconde Guerre Mondiale. Enfin, normalement c’est ça. Mais depuis neuf mois et la disparition soudaine de son mari, Magali surnage, survit, déconnectée de la réalité et du monde qui l’entoure.

Darius n’est pas mort, il ne l’a pas quittée, il a disparu. Et elle, avec ses deux enfants, elle devrait continuer, faire comme si tout allait bien, comme s’ils n’avaient pas été abandonnés.

De la rencontre de ces deux être perdus va jaillir une lumière, une force, que ni l’un ni l’autre ne soupçonnait. Celle de remonter à la surface de la vie qui les a laissés tomber, échoués sur le rivage.


« Si t’as pas compris que les Disparus sont chez eux en Normandie, (...) jette un œil aux 1557 Missing in Action dont les os blanchissent le fond de la Manche, classés par ordre alphabétique sur le mur du jardin à l’entrée du cimetière. »

Ce n’est pas un roman long mais c’est assez, le juste dosage, la bonne posologie. Avec la violence du débarquement et de la guerre, les premières pages nous laissent à peine le temps de reprendre notre souffle. On étouffe, on se noie, comme les soldats. On se croit dans les premières minutes du film de Spielberg, Il faut sauver le soldat Ryan. On y est, jusqu'au cou, sans possibilité de retour en arrière.

Puis on sombre, avec Magali, dans le désarroi, la perte de repères, la peur de l’abandon et l’incompréhension. On est submergés par le stress et l’angoisse de ne pas savoir et de chercher une solution qui ne vient pas. Avec elle, on culpabilise du départ de Darius, de ne pas réussir à s’occuper correctement de la maison et des enfants, on n’a pas envie de s’occuper de ce vétéran qu’on doit pourtant aller chercher à 13h00 à la gare de Bayeux.

Et pourtant, des vétérans, il n’y en a plus tant que ça, c’est une chance. Alors on suit Magali et on va gérer. S’interroger. S’inquiéter. Se lier et se surprendre à s’inquiéter pour quelqu’un d’autre. Mettre les évènements en perspective et se dire que malgré la douleur, la vie doit continuer.


Débarquer, c’est tout ça. Pas seulement des soldats américains sur une plage, mais aussi une femme, une maman qui déboule de gauche et de droite pour ne pas sombrer. C’est un vieil homme dont la rencontre nous encourage à embarquer à nouveau.

« Une drôle de journée le 7 juin , on n'en parle jamais du 7 juin. Je me suis réveillé dans un trou, j'étais gelé, j'étais sale. J'étais vivant. »

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