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Frère d'âme

David Diop

C'est un heureux hasard qui m'a fait croiser la route de ce fabuleux récit. Un article publié sur LinkedIn, indiquant que David Diop, avec son « Frère d’Âme », a reçu le Booker Prize, devenant ainsi le premier lauréat francophone de ce prix International. Tiens, je vais jeter un œil. Un mot, un seul, m'a suffi à vouloir lire ce roman : Sénégal.


Alfa Ndiaye et Mademba Diop sont tirailleurs Sénégalais. Un matin, l’assaut est donné. Ce même matin, Mademba est grièvement blessé. Mais Alfa refuse de mettre fin à ses souffrances. Il voit son ami agonir et puis mourir. La seule information qu'il a sur l'assassin ennemi, c'est qu'il a les yeux bleus. Alors Alpha va venger son ami, de manière terrible, violente, sauvage.


"Mon odeur est celle de la mort. La mort a l'odeur du dedans du corps projeté hors du vase sacré (...) et même les rats prennent peur quand ils me sentent arriver... "

Alternant les instants présents et les souvenirs du Sénégal, le protagoniste nous raconte qui il est, qui ils sont, d'où ils viennent, comment ils ont vécu et se sont aimés, deux enfants, deux amis, deux plus que frères.


Avec une simplicité dans le ton qui peut parfois faire penser à de la naïveté, Diop nous plonge dans l'esprit ravagé de ce jeune garçon qui est venu se battre pour la France, faire peur à l'ennemi, et perdre son meilleur ami, sa moitié, son frère d'âme.

Sombrant peu à peu dans la folie, il devient double, Alpha et Mademba, jour et nuit, force et faiblesse, beauté et laideur. Il se perd et nous perd avec lui. Mais ce dont on se souvient sans difficulté, c'est la souffrance d'avoir perdu de nouveau un être cher et avec lui une partie de son identité, de son âme. Le deuil le réveille aux aberrations de la guerre et de la situation, à l'importance de se rebeller et de réfléchir par soi-même, de faire semblant de se soumettre pour mieux être soi.


"La folie temporaire permet d'oublier la vérité des balles. La folie temporaire est la sœur du courage à la guerre".

Récompensé par le Prix Goncourt des Lycéens en 2018, il est aisé de comprendre que ce roman à la fois court et intense ait été couronné de succès au niveau international : c'est une ode à l'amitié mais aussi, d'une certaine manière, une dénonciation de ce qui a été commis par la France au moment de la Grande Guerre : en utilisant les "colonisés" au nom d'un pays et d'une idéologie qui n'étaient pas les leurs, les chefs de guerre ont transformé ces hommes en sauvages, jouant avec les coutumes et ne se souciant guère d'en faire de la chair à canon

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