Myriam Chirousse
« Pourquoi fallait-il que la paix vienne au cœur quand la vie n’y était plus ? »
En 1920, André a 18 ans. Sa mère, la seule famille qui lui restait, vient de décéder de maladie. Il lui avait dit de voir le médecin, mais rien à faire. Alors Pauline avait toussé, toussé, et ne s’était pas réveillée. Orphelin de père depuis de nombreuses années, le jeune homme mal né n’a plus personne. Il va bien falloir qu’il se trouve un travail pour payer le loyer de sa masure, de quoi manger et réaliser son rêve : partir un jour en Amazonie.
Personne ne veut de lui, à part le forgeron, drôle d’homme difforme et mal aimé. Bougon au premier abord, le bossu est finalement un brave homme qui voit en André un grand gamin au potentiel et à la motivation sans faille. Et au fur et à mesure que le jeune homme travaille à la forge, il se développe, prend en assurance et en stature. Il devient un homme. Un homme qui va attirer la fille du porteur d’eau, la belle Suzanne.
Pour elle, André est prêt à tout, même à confronter Mme Jourdan, la noble du village qui le regarde si mal, le dénigre, alors que Pauline l’a servie pendant des années et des années, jusqu’à ce que la guerre les sépare.
Pourquoi la vieille lui en veut-elle autant ? André deviendra-t-il le forgeron de talent que Monsieur Simon voit en lui ? Et Suzanne ? Quel avenir avec elle ?
Au fur et à mesure que le temps passe l’avenir devient de plus en plus flou mais André est prêt à beaucoup pour réussir et se sortir enfin de sa triste situation.
« Parce qu’il faut beaucoup grandir dans la tête pour être libre de ses actes. Et encore, certains le sont jamais. »
Auteure inconnue, titre inconnu, histoire inconnue, et puis Vleel est arrivé, tel Zorro, pour donner envie de découvrir tous ses inconnus ! Ce court roman, publié dans une maison d’édition qui a fait ses preuves plus d’une fois, prend aux tripes par sa tonalité, sa rudesse, son humanité et son oralité. Il sonne dans la tête du lecteur comme une histoire racontée au coin du feu. Une histoire d’orphelin, d’espoir, de combat et d’amour. Et avant toute chose de filiation. André aime tant sa mère, qu’il continue de la voir, de lui parler, de lui rendre hommage. Il veut la rendre fière, où qu’elle soit. Conscient des sacrifices qu’elle a fait pour lui, il aimerait lui rendre la pareille malgré le fait qu’elle soit morte.
J’ai trouvé dans ce livre la même rudesse que dans Né d’aucune Femme de Franck Bouysse, sans savoir si la période est la même, le lieu similaire. Mais c’est la même dureté de l’existence, la même inégalité entre ceux qui ont de l’argent - qui dominent - et ceux qui n’en ont pas et qui subissent.
Je me suis plongée avec délectation et beaucoup d’empathie et d’espoir dans l’histoire d’André qui se bat contre lui-même, contre son chagrin et contre le destin. André qui va tout renverser par amour, André qui ne se découragera pas, porté qu’il est par le souvenir de sa maman et de l’homme au perroquet vert, celui qui a fait naître le désir de voyage et de richesse.
« Le temps qui sépare de la perte est une seconde perte… »
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