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La mémoire qui flanche...

Mon cerveau et ma mémoire sont-ils élastiques ? Réflexion sur la capacité de stockage de mon organe le plus précieux et sur ses limites...


Dans le dernier roman de Franck Thilliez, Labyrinthes, il est question de mémoire. Ou plus exactement de ce que le cerveau est capable de faire pour annihiler les souvenirs les plus douloureux. Les héroïnes ont toutes des troubles de la mémoire et s’en inquiètent. Normal.

On entend parler d’amnésie partielle ou totale à la suite de traumatismes. Le SPT (stress post traumatique) est responsable de graves lésions, on le sait. Mais sans aller aussi loin dans le drame, la question que je me pose aujourd’hui concerne la quantité d’informations que le cerveau peut accumuler avant de lâcher. Un peu comme le nuage de données du Temps des Grêlons d'Olivier Mak-Bouchard : combien peut-on accumuler avant l’orage de la saturation ?


« La mémoire, ce passé au présent.” F. Chalais

Si je suis je me pose face à cette interrogation, c’est bien évidemment parce que j’ai la sensation d’y être confrontée. La question de la mémoire est quelque chose qui me passionne (comme tout ce qui touche au cerveau, soit dit en passant), qui m’interpelle, mais qui m’inquiète aussi. Ce que je raconte de mon enfance : est-ce vrai ? Sont-ce de vrais souvenirs ou ce qu’on m’a raconté des événements ? Quelle est la part de vécu qui n’est pas réelle mais imaginée, inventée et que mon cerveau a décidé que ce serait un souvenir ?

Je vous vois venir avec vos sourcils froncés et vos yeux interrogateurs : quel rapport avec la lecture ? Je m’empresse de répondre.


Depuis quelques mois, je me rends compte que je lis de plus en plus, de plus en plus vite. Je rédige des retours de lectures, je travaille mes visuels, je passe du temps après chaque livre pour en restituer l’essence et les émotions qui découlent. Mais il me faut de plus en plus souvent revenir à ces comptes-rendus pour me rappeler. Il y a des romans que je sais avoir lus, je me souviens en gros de l’histoire, je revis la plupart des émotions que j’ai ressenties mais je ne me souviens plus de certains passages ou même de la fin. C’est quand même dingue ! Et je dois dire que cela m’effraie, parce que je ne parle pas seulement des bouquins du collège, non, il y en a aussi que j’ai lus il n’y a que quelques mois. Je dois fournir un gros effort pour me rappeler.


J’ai déjà abordé dans un post précédent le fait que j’aime aussi beaucoup les livres audios, qui me permettent d’être dans la littérature tout en faisant autre chose. En ce moment, je suis avec La proie de Deon Meyer, le soir pour m’endormir (du coup c’est très très long à finir) et Le grand monde de Pierre Lemaître pour la voiture, le repassage et les moments de calme.

J’ai lu Meyer il y a deux ans. Normal que je ne me souvienne pas de tout donc. Mais Lemaître ? J’ai couru l’acheter le jour de sa sortie et me suis plongée dedans de suite. C’était il y a trois mois ! Vous m’auriez posé la question avant l’écoute, j’aurais été capable de vous dire à quel point j’avais été emportée, bouleversée, émue, enthousiaste. Je pouvais vous raconter l’histoire dans les grandes lignes, mais seulement celles-ci. Un résumé de quatrième de couverture avec un peu plus d’émotion dedans peut-être. Mais là, je réalise que je ne me souviens pas de la fin. Il en va de même avec American Dirt de Jeannine Cumins, ou d’autres parmi les 41 lus depuis le 1er janvier de cette année. Je dois le dire, je trouve ça particulièrement flippant.

Ma mémoire est-elle en train de saturer ? A quel moment mon cerveau sera-t-il plein ?

« Tout le monde se plaint de sa mémoire, et personne ne se plaint de son jugement. » La Rochefoucauld


En parallèle, il y a la mémoire sensorielle et les vecteurs d’apprentissage. OK, comme je ne veux pas vous perdre, je vous rappelle rapidement ce dont il s’agit. Chacun d’entre nous a un sens qui prédomine lorsqu’il s’agit d’apprendre et donc de retenir. On appelle ça le VAKOG : Visuel, Auditif, Kinesthésique, Olfactif et Gustatif.

Quand on parle de lecture, seuls les V A et K sont vraiment mobilisés. Si vous vous demandez quel est votre canal d’apprentissage prioritaire, on trouve plus de tests sur le net mais vous pouvez trouver des indices dans votre mode de lecture. Si la typographie est importante pour vous, si vous êtes sensible à la police, l’espacement des mots, que vous visualisez du texte (ou des couleurs) lorsque vous repensez à votre lecture en cours, alors vous êtes visuels.

Si vous retenez mieux ce que vous entendez et – plus – si vous entendez le texte lorsque vous lisez ou que vous aimez lire à haute voix, vous êtes plutôt auditif. Enfin, si c’est la texture du livre, son odeur, son toucher, la sensation du papier qui vous aide à vous concentrer, alors vous êtes plutôt kinesthésique. Je grossis le trait, je ne vais pas faire un cours de PNL (programmation neurolinguistique) ici, vous n’êtes pas là pour ça.


Du coup, forte de ces constats, je me dis qu’il va falloir que je me pose les bonnes questions et que je revois ma façon de lire. Peut-être y a-t-il quelque chose qui m’empêche de tout retenir, au-delà de la quantité emmagasinée. Si je veux pouvoir continuer à conseiller, il faut que je me souvienne. Il doit bien y avoir des liens, des moyens, non ?


Le site wikiHow donne des méthodes pour devenir un lecteur critique. Je suis d’accord avec presque tout… Sauf la partie : lire par petit morceau… Une fois lancée dans un récit, impossible pour moi de me mettre une limite à 15 minutes, je ne réussirai jamais à m’arrêter ! Le bureau de la RAC (Reconnaissance des Acquis et des Compétences) fait le même constat : il faut savoir faire des pauses… grrr… mais leur approche est aussi intéressante dans la prise en compte de l’environnement et de la posture. A creuser donc… Ce qui me pose problème, aussi, c’est le côté prise de notes et annotations de ce qu’on lit… moi vivante, jamais personne n’écrira dans mes livres, ni ne cornera de pages… Ce n’est juste pas possible ! D’aucuns disent que c’est une façon de faire vivre l’ouvrage, moi je trouve que c’est lui manquer de respect (mais je ne condamne aucun point de vue, je ne veux juste pas qu’on gribouille mes précieux !).


« Quand on apprend vraiment, on apprend tout au long de sa vie, sans être l'élève d'aucun Maître en particulier. Tout est prétexte à apprendre (...). Le Maître, c'est la vie même, et vous êtes en état d'apprentissage permanent. » Krishnamurti


Dans mes recherches, au final, l’article que j’ai trouvé le plus intéressant est celui du site memoriclub.com. Dans le post intitulé Comment lire et retenir vos lectures, l’auteur pose la question de l’intention. Et cela m’est apparu comme un flash… Bien sûr ! Si je lis pour passer le temps, me divertir, mon cerveau ne met pas en place les mêmes choses que si je lis pour apprendre ou rendre compte.

Ainsi, le blogueur met en exergue cinq types de lectures (passive, indicative, diagonale, active et analytique) et deux différentes stratégies de lectures suivant le type d’ouvrage (fiction ou non-fiction). Même si je n’adhère pas, encore une fois à tout (notamment le récap’ écrit à la fin de chaque chapitre), il y a des choses qui me paraissent intéressantes et qui pourraient m’aider à mieux mémoriser ce que je lis : prise de notes, mots clés, personnages. Un lien renvoie à un autre article sur le palais mental, qui n’est pas toujours adapté à la mémorisation des lectures fictionnelles mais qui peut quand même aider en cela que cela incite à revenir et à réfléchir sur ce que nous avons lu, lorsque nous ne lisons pas. Ainsi donc, lorsque je serai en train de conduire ou de faire mon repassage, au lieu de me remplir la tête avec autre chose, peut-être pourrais-je accorder du temps à mon cerveau pour revenir, réfléchir, rappeler ce que j’ai déjà lu.

J’ai été aussi intéressée par la multiplication des canaux de mémorisation : quand Andre Picard préconise de lire à voix haute ce qui a été noté lors de la lecture, cela me renvoie indéniablement à ce principe de VAKOG dont je vous parlais en début d’article. Je ne prends certes pas encore de notes pendant mes lectures mais je réalise que je retiens beaucoup mieux le sujet, l’intrigue, lorsque j’en parle au fur et à mesure (à mon mari, le plus souvent, qui est particulièrement gentil et qui m’écoute papoter de livres, lui qui déteste lire!).


« La mémoire est un livre qui ne se ferme jamais.» LM. Coupier

Ainsi donc, cet article (et ce site qui est désormais enregistré dans mes favoris) a plusieurs bons points. Outre le fait qu’il me donne des pistes de réflexions sur la manière de mieux engranger et surtout garder ce que j’accumule dans mon nuage de données, sa lecture m’a aussi et surtout permis de relativiser, de me poser la bonne question : je ne retiens pas tout, mais est-ce si grave que cela ? que recherche-je dans ma lecture du moment ? ai-je vraiment besoin de tout retenir ? et l’oubli est-il si important ou bien l’essentiel est-il d’avoir passé un bon moment avec les personnages et l’auteur ?

La réponse est dans la question, je sais… mais cela ouvre la porte du dialogue : que pensez-vous de tout cela ?



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