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La vie n'est pas un roman de Susan Cooper

Stéphane Carlier

« La vie a plus d’imagination que nous. »

Nora est belle, très belle. Et quand elle rencontre ce beau jeune homme, qui partage le même charme et le même magnétisme, sur la terrasse d’un café à Paris, elle ne résiste pas à l’invitation qu’il lui lance. Ils se retrouveront le lendemain soir. Au bord de sa Jaguar, il l’emmène dans une luxueuse propriété de la proche banlieue parisienne et là, il se révèle. Agressif, violent, violeur. Alors Nora se débat, se défend. Et lorsqu’elle se rend compte qu’elle a commis le pire, elle ne sait pas vers qui se tourner. Ah si… peut-être cette auteure de polar dont elle a lu un roman il y a peu. La sexagénaire semble maîtriser l’art de dissimuler un meurtre. Alors, via instagram, la jeune femme envoie un message à l’écrivaine, la suppliant de l’aider. 

Susan Cooper n’en revient pas. Être mêlée, pour de vrai, à la mort de quelqu’un… Pourquoi cette gamine l’a-t-elle contactée ? Comment s’en dépêtrer maintenant ? La veille de son départ pour Monaco, en plus, où elle doit parrainer le Salon du livre du recevoir un prix pour l’ensemble de son œuvre. For God Sake ! Et plus Susan tente de s’enlever Nora de la tête, plus ça la travaille. Elle se demande si la gamine aura assez de jugeote pour faire ce qui doit être fait, si elle ne va pas se planter ou pire, la mouiller elle… Elle n’a vraiment pas besoin de ça. 

De Paris à Monaco en passant par Portofino, Zagreb et Senlis (cherchez l’erreur), les deux femmes vont se creuser les méninges pour savoir comment maintenir l’illusion, ne pas gâcher le mensonge qui les unit l’une à l’autre et l’auteur de nous embarquer dans une aventure rocambolesque où la sororité intergénérationnelle prend le pas sur la justice et l’honnêteté. 

De rebondissements en conseils d’écriture, on suit Nora et La Cooper, séparément d’abord puis ensemble, dans cette fuite rocambolesque aux doux parfums d’une aventure de Miss Marple. Un régal !


« Tel est l'avantage d'exercer un métier que l'on aime passionnément : nos problèmes personnels, tant qu'ils n'atteignent pas un certain degré dans l'horreur, s'effacent quand on travaille. »

Il ne m’aura pas fallu longtemps pour retrouver Stéphane Carlier après la découverte de sa Clara. Impossible d’attendre plus longtemps de toute façon ! Ici, plus de Proust, on s’approche plus du style Agatha Christie, avec de délicieuses références à d’autres maîtres du genre, dont Sébastien Japrisot (quel bonheur cette évocation de La dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil !). On ne s'ennuie pas un seul instant dans cette aventure qui lie deux personnages qui n’ont comme point commun que d’être des femmes !

Les conseils d’écrivain ponctuent le récit comme les petits cailloux indiquent le chemin à emprunter, en nous faisant parfois prendre des directions inattendues et surprenantes. On savoure l’humour de l’auteur comme Susan savoure les bons petits plats et on se marre en se demandant : Que diable allait-elle faire dans cette galère ? 

Plus épicé que Clara (moins proustien aussi), ce roman est une bouffée de bonne humeur et de délicatesse, une ode à la création littéraire mais aussi une mise en lumière du véritable travail d’écrivain, de la recherche de crédibilité et de reconnaissance, du besoin d’être apprécié et de l’importance du lectorat. 

« Car écrire, c'est tout de même donner une certaine réalité à ce que l'on raconte. Entre les mots et l'absence de mots, il existe bien une différence, non ? »

A travers Susan Cooper, n’est-ce pas Stéphane Carlier qui s’exprime sur son travail et ce que cela lui coûte parfois, nécessite de rigueur et de sérieux ? Et le lien avec les lecteurs ? celui-là même qui permet à quelques-uns de vivre dans l'opulence pendant que d’autres galèrent à percer et sont reconnaissants du moindre petit signe de la part de ceux qui les lisent ? 

J’extrapole - peut-être. Mais ce qui est sûr, c’est que je ne suis pas prête à lâcher cet auteur encore inconnu il y a quelques semaines et qui m’a été conseillé, pour ne pas dire offert par une insta-lectrice que je ne remercierai jamais assez pour ce merveilleux trait de lumière. 


« c'était ainsi qu'il fallait vivre, ou au moins créer : le plus généreusement possible, avec un respect infini pour ceux qui vous écoutent ou vous lisent. »

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