Charlotte Brontë

« Au milieu de la vie, nous sommes avec la mort. »
Dans le premier quart du XIXème siècle, le jeune William Crimsworth sort tout juste d’Eton. Orphelin, il refuse les offres faites par ses oncles maternels de s’installer en temps que pasteur et d’épouser une de ses cousines, se retrouvant donc forcé de faire appel à l’aide de son frère aîné, Edward. Ce dernier n’a que faire de ce cadet qu’il méprise, mais lui offre tout de même un poste de subalterne dans sa manufacture, cherchant à tout prix à le déstabiliser et à trouver la faille , en vain.
La rencontre avec Hunsden va obliger William à prendre des risques en démissionnant et en quittant l’Angleterre. A Bruxelles, il trouve, grâce à une recommandation, une place de professeur dans un établissement de garçons, tenu par le sympathique M. Pelet et, les méthodes du jeune enseignant faisant vite leurs preuves, il lui est proposé d’intervenir également pour l’école de jeunes filles voisines.
Là, il fait la connaissance de la directrice, Mme Reuter, qui le charme avant de le trahir et de révéler sa véritable nature, perfide, manipulatrice et jalouse. Jalouse car elle a bien vu que le professeur s'intéresse de très près à l’une de ses élèves, enseignante elle-aussi. Mme Reuter va tout mettre en œuvre pour séparer les deux jeunes gens mais elle sera perdante puisque William, conscient de ses sentiments pour la demoiselle, fera ce qui lui semblera juste pour la retrouver, au péril de sa carrière.
« En général, sur le Continent, ou du moins en Belgique, les vieilles femmes se permettent une liberté de manières et de langage que repousseraient nos vénérables aïeules comme honteuse et dégradante… »
J’ai lu pour la première fois Jane Eyre lorsque j’avais 13 ou 14 ans. Pour moi ce roman contenait tout : une héroïne courageuse, des épreuves, de l’amour, encore des épreuves, et enfin la preuve que l’humilité et la pugnacité pouvaient tout. Je ne connaissais pas du tout Le Professeur, de la même auteure, édité en 1857 à titre posthume. Ce roman, qui est en vérité le premier écrit par Charlotte Brontë, a été proposé après son chef d'œuvre aux éditeurs et n’a pas trouvé preneur. Et je dois avouer que je comprends pourquoi. Certes, je le lis à la lumière de ma condition de femme française du XXIème siècle, mais le caractère, les idées reçues et les avis arrêtés de William m’ont profondément déplu. A travers lui, l’auteure décrit les Belges rustres, les Français caractériels, les Anglais superficiels,... Personne ne trouve grâce à ses yeux et même Frances, la belle étudiante, n’est pas épargnée. On sait que la beauté est intérieure avant tout, c’est tout le propos de Jane Eyre, mais il n’empêche : William exprime clairement sa satisfaction du rapport dominant-dominée qui le lie à son élève et il fait l'apologie de la soumission de la Femme, quelque soit son niveau intellectuel. Elle se doit de laisser à l’Homme la supériorité en tout.
Loin de moi l’idée de revenir sur mes convictions, mais même sans être misandre, on ne peut qu’être choqué(e) et désarçonné sur ce personnage qui se vante de beaucoup de qualités (dont certaines en sont vraiment) mais qui est détestable par sa vanité, dissimulée aux autres protagonistes mais bien visibles aux yeux du lecteur.
Je l’ai lu, j’ai aimé certains passages, mais je ne peux faire passer l’arrière-goût de la déception, cependant mêlé à celui de la satisfaction d’avoir pu lire un autre Brontë… C’est un premier roman, je ne l’oublie pas, et à ce titre, il contient des erreurs qui ne se retrouvent pas dans les suivants, et c’est heureux !
« Je m'inquiéterai peu de la pauvreté de sa bourse tant qu’elle aura dans le cœur cette richesse dont il déborde. »
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