Jean Hegland

« Voici un nouveau présent, dit une nouvelle histoire. Bois à longs traits et laisse-le te remplir. »
La forêt de Californie, dans un temps incertain mais futur. Nell et Eva, deux sœurs, élèvent leur fils Burl dans un capane. Les années passées ont été rudes mais tous les trois ont réussi à subvenir à leurs besoins, à apprendre non seulement à survivre mais tout simplement à vivre, en harmonie avec les exhalants et les inhalants de la forêt. Les deux jeunes femmes mettent un point d’honneur à protéger le jeune garçon et à le mettre en garde contre les gens, surtout depuis que les marchands de la Côte sont venus, il y a quelques années et que cette invasion a entraîné pour la petite famille une saison de disette et de faim sans précédent.
Nell et Eva se méfient des éventuels Autres, mais Burl, lui, est curieux. L’an dernier, la nuit du Feu de Joie, alors qu’ils célébraient le solstice sur le toit de la forêt, ils ont vu au loin un grand feu. Depuis, l’adolescent est obnubilé par la possibilité qu’il y ait d’autres personnes, ailleurs. Et dans toutes les histoires que ses mères lui ont raconté, la rencontre est une chance, alors lui aussi veut aller au devant des étrangers. Lorsque Le temps d’après débute, Burl a 15 ans et la terre est toujours en colère. Il n’y a quasiment plus personne mais la nature continue de se venger du mal qu’elle a subi et une sécheresse sans précédent tombe en plein hiver. Il faut trouver un moyen de subsistance en utilisant toujours moins d’eau. Et c’est dans la quête de l’eau que va advenir la découverte des Autres.
Malheureusement pour Burl, Nell et Eva ont toutes deux un passé marqué par la violence et la douleur, et elles ne veulent pas de cela pour leur fils, qui doit se résoudre à rester dans ce huis clos qui lui est de plus en plus oppressant, et à trouver du réconfort dans ses souvenances et son imagination.
« Les seules histoires qui valent la peine d'être racontées sont les histoires vraies, et les histoires vraies ne font que nous briser le cœur »
Quinze ans après la fin du magnifique Dans la forêt, nous retrouvons donc Eva et Nell, ainsi que le bébé devenu grand, Burl. A travers le regard et les mots de ce dernier, nous apprenons comment les deux sœurs et leur enfant ont pu trouver un moyen de vivre dans cette forêt qui est bien plus qu’un abri pour eux. Au fil des années, ils ont appris, ont su improvisé, se sont adaptés et ont dominé les difficultés qui se sont présentées.
« Sans solution aux problèmes des autres, il nous semblait impossible de trouver comment dépasser les nôtres. »
Avec la même dureté et le même constat implacable que dans le premier opus, l’auteure nous dresse le tableau d’une nature en colère, d’une planète vengeresse qui, plus de 15 ans après les premiers évènements, continue de faire payer des siècles de mauvais traitement.
J’ai rencontré quelques difficultés à réellement entrer dans le roman car je devais comprendre le langage de Burl. Puis petit à petit, je m’y suis habituée. J’ai été subjuguée par cet amour inconditionnel entre les deux sœurs et ce garçon grandissant en harmonie avec la nature, leur inventivité et leur combativité.
Il y a un avenir sombre qui attend l’humanité mais il y a aussi beaucoup d’espoir dans l’amour que les protagonistes se portent, non seulement les uns aux autres mais aussi à leur environnement. C’est un constat accablant de se dire que nous courrons probablement au drame écologique, et ce même constat m’a dérangée pour vraiment apprécier, à 200%, ce roman tant attendu, car à l'émerveillement s'est mêlée la peur. Au demeurant, la lecture est agréable et le roman ne se laisse pas abandonner. On est même en droit d’attendre encore une suite, avec impatience…
« J'ai senti à quel point une promesse pouvait être fragile et reposait plus sur ce qu'on voulait et espérait et souhaitait que sur ce qu'on savait avec certitude. »
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