Charles Pépin
Plusieurs circonstances m’ont menée à la lecture de cet essai philosophique. Le titre d’abord, croisé au détour d’une vidéo de Et Tout le Monde s’en fout sur l’échec justement. Et puis une petite pointe d’humour : le lire dans le cadre du #challengeRCL21 dans la catégorie du livre qui me fait penser à mon premier amour j’avoue que je trouvais cela assez drôle. Ce premier amour m’a peut-être fait souffrir par l’échec qui en a résulté, mais il m’a appris aussi beaucoup sur moi et ma relation aux autres. Et quel bien m’en a pris de me lancer, enfin, dans ce petit livre jaune.
Dans le respect et la continuité de l’éducation que j’ai eu la chance de recevoir, j’ai souvent dit et répété, à moi comme aux autres que :
Ce qui ne me tue pas me rend plus forte,
A chaque chose malheur est bon,
Quoiqu’il arrive les épreuves ne me feront pas un deuxième trou (comprendre qu’il est rarement question de vie ou de mort !) …
Charles Pépin va dans ce sens, mais bien plus loin. Il valorise l’échec. Mais il le valorise intelligemment, parce qu’il l’analyse. Apprentissage, humilité, changement de point de vue… en se basant sur les théories des grands penseurs de l’Histoire et les expériences de personnalités connues et reconnues comme Thomas Edison ou Steve Jobs, en passant par Barbara ou Rafael Nadal (pour ne citer qu’eux), le professeur de philosophie nous accompagne dans une étude constructive de l’échec. Notons par ailleurs qu’en se basant sur les vécus de figures emblématiques et universellement distinguées, il construit un imaginaire collectif qui permet à tous les lecteurs de non seulement connaître mais également comprendre ses explications. Les discours et théories de Freud, Lacan, Nietzsche et autres philosophes, en lien avec les expériences de ces stars, sont - du coup - beaucoup plus accessibles.
Il ne s’agit pas ici de nous faire la morale mais bien de nous ouvrir les yeux sur les défauts et manquements que Pépin estime être ceux de la société française en général et l’éducation nationale en particulier.
Sous couvert de l’égalité des chances, les individualités sont annihilées : on veut que tous les enfants acquièrent les mêmes connaissances, avec de bons résultats partout, en faisant le maximum pour éviter les échecs. Un élève mauvais en maths (je plaide coupable) n’a pas moins de valeur et de capacité qu’un autre qui lui, sera moins compétent en littérature par exemple.
Il insiste sur l’idée qu’acceptée et analysée, la défaite est une réussite. Qu’elle soit un acte manqué qui nous révèle quelque chose de notre moi profond ou une expérience du réel qui nous oblige à nous adapter, elle fait partie intégrante de ce qui non seulement fait l’évolution de l’humanité mais également la liberté de l’homme. La liberté de choisir, la liberté de se planter, la liberté de rebondir.
Nos échecs sont des butins, et parfois même de véritables trésors. Il faut prendre le risque de vivre pour les découvrir, et les partager pour en estimer le prix.
PS : j’ai noté également avec plaisir que Charles Pépin, comme moi, reconnait l’art, les leçons de vie et l’audace dans l’œuvre d’Emmanuel Carrère (p.177).
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