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Porca Miseria

Tonino Benacquista

Il aura fallu que deux lectrices fidèles, toutes deux d’origine italienne, me fassent l’apologie du dernier livre de Benacquista pour me convaincre de me lancer dans ce récit intime d’un des acteurs les plus prolifiques de la littérature contemporaine.


« Faute de réparer, écrire c’est rétablir. C’est rendre dicible ce que l’on pense, ce que l’on ressent, ce que l’on est. »

Dernier enfant d'une fratrie de cinq, Tonino revient sur son Histoire, celle de sa famille. Le point de départ : l'enlèvement de sa mère par son père, dans la campagne italienne. Elle devait épouser un médecin, elle a préféré fuir avec un fermier. Et l'a immédiatement regretté. Quelques années plus tard, leur arrivée en France. Elena le vit comme un déchirement et elle ne sortira plus jamais de ce que l'on appelait alors la nostalgie. Lui, Cesare, trouvera refuge et réconfort dans la boisson. Jamais physiquement violent, il n'est cependant jamais vraiment là. La famille vit autour de lui mais sans lui. Un à un, les enfants vont grandir et atteindre l'âge adulte, l'indépendance, la liberté.

Seul restera le petit Tonino, arrivé sur le tard. C'est lui qui goûtera à une vie d'enfant unique. C'est lui qui verra ses parents ne pas s'aimer mais ne pas se quitter. C'est lui qui trouvera du réconfort à cette situation lourde et moite dans la fiction. Sans lire, il trouve dans l'imaginaire qu'il se crée une porte de sortie. Fasciné par la littérature, mais de loin, il décide d'en faire son métier sans s'y frotter. 1968 lui permet de s'engager dans une filière littéraire sans trop de contraintes. Et de rencontres en devoirs, il fait finalement la connaissance des livres : Bradbury, Balzac, Rostand. Et la collection Série Noire de Gallimard. Commence alors la concrétisation de son rêve, celui de l'écriture. La libération, les difficultés, la consécration. Et toujours des questions sur son identification.


« Ecrire, c’est se venger. C’est matérialiser une pensée magique qui parfois vire à la sorcellerie. »

Pas encore complètement remise d'un séjour littéraire à Dakar avec Hadrien Bels, j'ai eu du mal à me plonger dans la biographie de cet auteur à la dualité identitaire. Né de parents italiens sur le sol français, Tonino ne sait pas vraiment ce qu'il est. Où est sa place. En tous cas, il ne se sent pas bien. Il s'accroche et s'en sort, sans réel effort à l'en croire, et c'est aussi ce qui rend ce récit un poil agaçant malgré les touches d'humour bienvenues dont il parsème son histoire de vie.

J'ai eu du mal, mais j'ai aussi appris. La vie des immigrés italiens des années 50-60, leurs rêves, leurs espoirs, leurs désillusions, leur cloisonnement, la force de caractère dont leurs enfants ont dû faire preuve. Je n'avais lu qu'un seul roman de Benacquista (Saga), je ressors de là avec l'envie de me plonger dans d'autres de ses écrits : Malavita, La commedia des ratés, Les morsures de l'Aube... Déçue de voir que l'écrivain a cédé, comme beaucoup, à la tentation de l'exercice du “moi je”, je ne me suis pas plu dans cette vie-là. Sans doute n'était-ce pas le bon moment pour nous de nous retrouver ici ?... Porca Miseria est lu, je peux passer à autre chose.


« Se livrer au plaisir de l’extrapolation, c’est se consoler du talent que la vie n’a pas eu. »

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