Jean-Christophe Grangé
« La révolution dévore ses enfants, c’est bien connu. »
Notre histoire commence à Paris, en mai 1968. Jean-Louis, Hervé et Nicole sont tous impliqués plus ou moins directement dans les événements qui ont bouleversé la France en ce chaud printemps. Ils sont liés les uns aux autres. Ils le seront d’autant plus que Hervé découvrira le cadavre de la meilleure amie de Nicole, Suzanne, atrocement mutilé alors qu'il s'apprête à lui déclarer sa flamme.
De fil en aiguille, on comprend ce qui relie les personnages les uns aux autres, et le ciment qui va les pousser à enquêter ensemble, d’abord sur le meurtre horrible de Suzanne puis, comme on peut s’y attendre sur d’autres crimes, dans le milieu Indien de Paris.
Les investigations de ce trio inattendu vont les mener au Bengale, à la source des sectes mystiques et des religions obscures. D’horreur en horreur, de rencontres en drames, ils avancent bon an, mal an dans leur enquête, toujours plus secoués, plus toujours plus soudés.
Ils se confrontent à ce qui se fait de pire, dans un pays rongé par la misère et malgré tout baigné d’amour et de spiritualité. Dans le temps du rêve hippie, de la recherche de sens et de la perte de soi dans les méandres des drogues (plus on moins naturelles), ils surnagent à Calcutta et Varanasi, en quête de réponse et de sens.
Jean-Louis, le flic, ancien d’Algérie. Hervé, jeune étudiant en Histoire, qui ne comprend pas bien pourquoi on accole le mot Révolution aux événements de 68. Nicole, étudiante elle aussi, qui se bat auprès des ouvriers, avant de rentrer chez elle dans les beaux quartiers de Paris.
Ces trois-là n'ont pas grand-chose en commun de prime abord, mais ils iront ensemble jusqu’au bout de leur enquête : une plongée toujours plus profonde dans l’horreur.
« Quand on ne comprend pas, on comprend tout de même une chose : la nature de l’inconnaissable. »
Je crois que l’on peut dire sans trop se tromper, que Jean-Christophe Grangé a retrouvé son Modjo ! Après son superbe retour avec Les Promises l’an dernier, qui nous plongeait dans les crimes cachés dans Berlin nazi, c’est cette fois en 1968 à Paris, en Inde, puis en Italie que l’auteur nous emmène, dans une enquête aux nombreux rebondissements.
Après toutes ces années à le lire (et quelques déceptions en cours de route) je me suis régalée dans ce voyage géographique et chronologique. Mais également ésotérique ! Il y a bien des fantaisies, des idées quelque peu farfelues, mais il y a aussi et surtout la maîtrise des personnages, les description des lieux et d’une époque, qui accompagnent le lecteur sur le terrain.
Dès les premières pages, on y est, dans ce Paris d’il y a 50 ans ! Et la même magie opère à Calcutta, à Varanasi, et même à Rome… On sent dans son écriture le souci du détail sans être lourd, l’envie de surprendre mais pas n’importe comment. Et puis il y a les frontières traversées, les villes magnifiées, malgré les pavés ou la mousson.
Pour ceux qui, comme moi, ont eu la chance de découvrir non seulement un auteur, mais aussi un genre, il y a déjà plus de 20 ans, c’est très émouvant de retrouver Grangé dans ce qu’il fait de mieux : nous transporter dans son monde d’enquête et de criminalité, où la violence n’a pour limite que celle de son imagination !
Ce Rouge Karma n’est peut-être pas le meilleur roman de l’auteur (Le vol des Cigognes reste ma référence!), mais une chose est sûre, c’est qu’il marque le retour du Grand Grangé ! Ames sensibles s’abstenir, amateurs de polar, foncez !
« Le monde réel est une constante désillusion comparé à nos songes, mais il ne nous laisse jamais le temps d'être déçu - il nous submerge aussitôt, avec une autorité impérieuse.»
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