David Park
« Tout est caché, même les secrets que je serre fort pour les empêcher de trouver la lumière. »
Noël est dans quelques jours. La neige est tellement tombée que les avions ne volent pas au dessus de l'Ecosse et de l'Irlande du Nord. Luke, jeune étudiant, est coincé à Sunderland. Pour ses parents, il est impossible de le laisser seul et malade dans cette ville inconnue pour les fêtes. Alors Tom, le père de famille, décide de faire la route et d’aller chercher son fils, de le ramener à la maison.
Départ aux aurores, la route va être d’autant plus longue que les routes ne sont pas toutes dégagées, la vitesse est réduite. Au fil des kilomètres, Tom, seul avec son GPS et sa musique, est confronté à lui-même, à ses pensées, à ses souvenirs. Aller chercher Luke. Rassurer Lorna - sa femme - et Lilly, leur petite dernière. Offrir à sa famille la sérénité qu’ils méritent tous, faire la paix avec soi et avec son passé.
Quelques rencontres, sur le ferry, sur une aire d’autoroute, sur le bord de la route près d’une voiture accidentée. A chaque personne qu’il croise, Tom répète la même chose : qu’il va chercher son fils pour le ramener à la maison. Mais il ne parle pas de celui qu’il n’a pas trouvé, de celui qu’il n’a pas réussi à sauver, du drame qui les a frappés il y a quelques mois.
« Il n’y a pas plus sûr moyen d’envoyer nos enfants sur une orbite lointaine que d’essayer de les maintenir dans notre champ gravitationnel. »
Ce roman est plus une confession qu’un journal de bord, comme on pouvait s’y attendre à la lecture du résumé. C’est une introspection, une recherche de sens et de rédemption. Il y a des tours et des détours dans les pensées de ce père de famille, photographe de profession, qui n’a pas toujours su regarder la vie avec ses yeux, sans la protection de l’appareil photo.
Il n’a pas d’autre choix que de faire le point, de se souvenir. La présence de l’absent, d’abord floue, prend peu à peu de la netteté, un visage, une histoire. On s’interroge forcément sur ce Daniel qui apparaît d’abord de manière fugace pour être ensuite une personne, une entité, une douleur.
Il y a des longueurs qui peuvent agacer au début, parce qu’on ne comprend pas tout. Mais une fois le livre terminé, on réalise que le travail, le cheminement, est le même que lors d’une thérapie. D’abord trouver le point d’ancrage au traumatisme, accepter de s’y confronter en prenant des routes secondaires, puis finalement faire face, faire front, faire la paix. Accepter et se pardonner. C’est la destination, le but. Comme d’aller chercher son fils pour le ramener à la maison.
Premier roman traduit en français, ce voyage en territoire inconnu donne envie de lire les (dix) autres écrits de cet auteur irlandais qui semblent aimer, comprendre et accepter ses personnages, tout en ayant sur eux un regard objectif et constructif, sans sentimentalisme.
« … je suis dans un no man’s land entre ce qui aurait dû être l’avenir et le passé qui a été, sans savoir auquel des deux j’appartiens. »
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