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Instagrammable

Eliette Abécassis

«  Instagram a introduit de nouveaux standards qui modèlent les imaginaires selon des critères précis, les orientant e façon implacable selon des lois mystérieuses que tous respectent tacitement, sous peine de ne pas être Instragrammables »

Il fallait une lecture rapide, aux antipodes des années 1960 pour me changer les idées après "Premier Sang". Et bien voilà, aussitôt voulu, aussitôt lu. Je me suis plongée une nouvelle fois dans les dangers des réseaux sociaux. Je me sors aussi un peu la tête de la rentrée littéraire comme ça, mais ça va, ça n'a pas duré trop longtemps !


Imaginez "Les liaisons dangereuses" à notre époque. Jade et Leo sont Merteuil et Valmont. Sacha est Cécile, Emma est Madame de Tourvel. Par un jeu d'influences, de posts, de messages, de tweets, Jade décide de se venger de Sacha, utilisant son ami Leo. Ce dernier tombe amoureux d'Emma. Chassé-croisé amoureux, sur base de qui tag qui, qui suit qui, qui a le plus plus de followers et de poids sur les réseaux. Instagram est la toile de fond de ce carnage, car il facilite, accélère, amplifie les hauts et les bas, les réputations, les mots et les maux.


Critique plus qu'acerbe d'une société dans laquelle il y a ce qui est "instagrammable" et ce qui ne l'est pas. Une génération qui oublie que le pont Mirabeau doit son nom à un poète amoureux, qui ne regarde plus ce qui est vraiment, se contentant de se concentrer sur ce qui paraît.


"... comme si un instant non photographie, non partagé n'était pas réel, comme si vivre sans images et sans se mettre en scène, c'était faire semblant".

Delphine de Vigan avait, dans "Les enfants sont rois" fait le procès des parents qui exhibent leurs enfants au monde entier, avec presque autant de fougue que Joyce Carol Oates dans son "Petite Soeur mon amour" (ce dernier se passant sans Internet, mais tout autant dérangeant).

Là, ce qui est terrible, c'est que l'instrumentalisation de l'être est volontaire. Ces jeunes qui s'exhibent, se montrent, montrent les autres pour mieux assoir ou détruire leur réputation le font de leur plein gré. Les modes de communication actuels laissant penser à nos ados qu'influenceur est un métier d'avenir, ils se détournent de tout le reste.


Suis-je une vieille réac ? Je me le demande. Je ne pense pas. Mais il faut savoir raison garder, et Eliette Abécassis nous prouve, si besoin était, que le cœur de nos ados n'a pas cette raison.


...On ne peut pas être avec quelqu'un sans images, sans Instagram...

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