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Tibi la blanche

Hadrien Bels

« pour un Sénégalais, La France c’est la femme auprès de laquelle tu vas te plaindre de tes maux de dos, alors que tu réserveras tes prouesses de lit à ta maîtresse »

Dakar, Sénégal, printemps 2021. Tibi, Neurones et Issa attendent les résultats du baccalauréat. Pour chacun d’entre eux, amis depuis l’enfance, ce diplôme est une porte ouverte vers l’avenir, la suite de leurs vies. Ils sont nerveux, anxieux. Ils sont jeunes, mais ayant grandi à Dakar, ils sont déjà grands.

Tibilé est belle, ambitieuse, sauvage et rebelle comme son père. Elle rêve de la France où elle ira si elle obtient le bac avec mention. Mais elle aime tant son pays - qu’elle trouve pauvrement beau - et sa ville, que c’est une impatience teintée de nostalgie qui l’étreint.

Issa est beau, fantasque, créatif, frondeur. Son enfance sans père, chez sa mère et son beau-père, baigné dans les difficultés scolaires ont forgé son envie de s’en sortir par sa couture, les pouvoirs des marabouts et grâce à ses amitiés qui l’ont bien des fois sorti d'affaires.

Neurones n’est pas beau. Il est doué, intelligent, dissident, ambitieux. Face à ce qu’il considère comme des échecs, il préfère changer de direction plutôt que de s’avouer vaincu. Il veut être le premier, le meilleur, ce qui lui rend la vie plus difficile qu’on pourrait le penser. Son statut de fils de riche ne l’aide pas non plus, mais il garde la tête haute.

Ces trois là s’aiment comme des frères et sœur. Ils ont grandi ensemble, dans les rues de la capitale sénégalaise, sur les bancs du collège puis du lycée. Ils sont une famille, un noyau dans une cellule qu’est la société Dakaroise. Chacun d’entre eux avec ses rêves et ses histoires, ses coutumes. Ce qui pourrait les séparer est fort, mais ce qui les lie les uns aux autres l’est plus encore. Malgré ce qui arrivera, malgré les chemins qu’ils emprunteront et les décisions qu’ils prendront.


« … ton nom te relie aux autres. Tu es la pièce du puzzle d’une histoire ancestrale qui ne s’apprend pas dans les manuels scolaires. »

Hadrien Bels signe ici son second roman, après un premier essai très convaincant. Il reprend les thèmes qu’il avait si bien exploités dans Cinq dans tes yeux, à savoir l’amitié, la jeunesse, la vie des quartiers. Ici, on quitte Le panier de Marseille où l’auteur a grandi pour rejoindre Dakar, qu’il considère comme son deuxième chez lui. Il a su puiser dans la capitale sénégalaise l’essence même du pays et de sa culture plurielle. Bien que la jeunesse dakaroise ne soit pas forcément représentative de toute la jeunesse sénégalaise, elle en est tout de même un bel échantillon. Dans cette cité en construction se croisent les ethnies, les religions, les rêves d’avenir, les possibilité de partir ou de rester.

Avec une langue simple mais jamais naïve, Bels retranscrit l’essence même de ces enfants qui n’en sont déjà plus, le passage d’un cap que nos adolescents français ne marquent plus tant : celui de la fin de la scolarité. Le bac n’a pas la même consistance ici et là-bas. Pas les mêmes conséquences, les mêmes enjeux. C’est un sésame, la boussole qui donnera la direction à prendre. Les descriptions des lieux, des liens, des gens, des us… tout nous plonge dans les rues du beau Dakar, nous fait rencontrer un peuple, nous immerge dans des cultures et des familles. J’ai ri, beaucoup. J’ai reconnu, j’ai découvert, j’ai même essuyé quelques larmes. J’ai fermé les yeux et me suis laissée envahir par ce pays que j’aime tant. Comme j’ai aimé Marseille dans les lignes de l’auteur, j’aime (encore plus) Dakar. Il me tarde de le retrouver. Et en attendant, je garde Tibi près de moi, pour retourner là-bas grâce aux mots de Bels.


« Ces jeunes qui grandissent une partie au pays, l’autre en France. A la fin, ils sont de nulle part. »

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