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Veiller sur elle

Jean-Baptiste Andrea

Cette rentrée littéraire 2023 est de toute évidence celle de Jean-Baptiste Andrea. L’auteur, avec son quatrième roman, est absolument partout, y compris dans les sélections des plus prestigieux prix littéraires. Il me fallait découvrir ce sur quoi l’auteur nous demandait de veiller.


« Les morts sont nos amis. Tu ferais mieux d'avoir peur des vivants. »

A l’automne 1986, dans l’abbaye de la Sacra, au nord de l’Italie, un homme est sur le point d’expirer. Né en 1904, il est aujourd'hui très âgé et vit dans le secret et le dénuement. Mais il est aussi l’un des plus grands sculpteurs du siècle, malgré sa petite taille. Sur son lit de mort, il se souvient de sa vie mouvementée.

Né en France de parents italiens, il est envoyé en Italie à l’âge de 12 ans par sa mère, veuve depuis peu, qui le confie aux soins d’un oncle. Avec cet homme bourru et violent, Mimo souffrira et voyagera. Il touchera et travaillera la pierre comme son père avant lui. Quand ils arrivent en 1916 dans le village de Pietra d’Alba, l’adolescent rencontre Viola Orsini, fille de Marquis, sa jumelle (presque) cosmique, qui l’accompagnera physiquement ou métaphoriquement toute sa vie. Impétueuse, insolente, ambitieuse, Viola n’a que faire de la petite taille de son ami, elle ne voit en lui que le génie, le potentiel, la protection aussi.

De déconvenues en rebondissements, Michelangelo Vitaliani, puisque c’est son vrai nom, passera de la misère la plus profonde au succès le plus flamboyant. De Florence à Gênes en passant par Rome et bien sûr Pietra d’Alba, il se construit, il se façonne, au gré des rencontres et du temps qui passe. Il est impliqué bien malgré lui dans le fascisme de la fin des années 30 et s’en délivre, sous l’impulsion de Viola qui est toujours là pour lui montrer le bon chemin. Lié à la famille Orsini à bien des égards, il en est à la fois le bienfaiteur et la victime ; tout comme de son amour pour Viola.


« Le talent ne se possède pas. C'est un nuage de vapeur que tu passes ta vie à essayer de retenir. »

Je trouve qu’il est particulièrement compliqué de raconter cette histoire qui courre sur 82 ans, presque tout un siècle de malheurs, de guerres, d’amour et d’art. Parce qu'au-delà des rebondissements historiques et politiques, c’est bien de cela dont il s’agit : d’amour et d’art. Ou plutôt de l’amour de l’art, à moins que ce soit l’art de l’amour. Je tourne en rond, je n’ai pas les mots. Ce roman m’a littéralement prise en otage. Impossible de lâcher cette fresque, cette vie faite de misère et de rédemption, de pauvreté et de richesse. De perspectives aussi, qu’elles soient dans la conception d’une œuvre ou dans la vision de ce qui nous entoure. Tout n’est qu’une question de point de vue et les apparences sont souvent trompeuses, c’est le message que j’ai reçu de l’auteur. Mimo est nain mais c’est un grand homme. Viola est une femme, mais elle est bien plus forte et intelligente que les mâles qui l’entourent. L’ours n’est pas dangereux, mais la terre si.

La plume d’Andrea est douce mais pas faible. Elle nous fait voyager dans le temps, dans l’Italie du XXème siècle et dans les émotions. Elle nous invite au voyage, à la découverte de l’Art, de nos perceptions, de nos identités au-delà des apparences. Ce roman, de mon point de vue, ne se lit pas, il se vit. Il est sensations, émotions. Il est une remise en question de ce que nous prenons pour acquis. De la même manière qu’un mourant peut avoir beaucoup de choses à dire, un morceau de marbre peut avoir beaucoup de choses à faire ressentir.

La rentrée littéraire 2023 est celle de Jean-Baptiste Andréa. Je valide, définitivement !


« Personne ne fait jamais rien de mal, la beauté du mal étant précisément qu'il ne demande aucun effort. Il suffit de le regarder passer. »

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