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Nos cœurs disparus

Celeste Ng

« les mots portaient en eux des secrets, l’histoire de leur propre avènement, toutes leurs existences antérieures. »

Aux Etats-Unis, Noah vit avec son père dans un appartement de Baltimore. Sa mère les a quittés du jour au lendemain, voici déjà trois ans, et l’adolescent a nourri un sentiment mêlé de chagrin et de colère. Ethan refuse de parler de celle qui est partie. Elle ne fait plus partie de leur vie, il interdit même à son fils d’aborder le sujet. Toutes traces d’existence de cette femme ont été brûlées, comme si elle n’avait jamais existée. Et au forces de l’ordre qui posent des questions, le père de Noah assure ne pas partager les convictions de celle qui les a abandonnés. Mais un jour, l’adolescent reçoit une lettre : des chats, dessinés, partout. Et une petite porte. Rien d’autre. A lui de mener l’enquête, de démêler les fils et de comprendre le message que sa mère a voulu lui transmettre. Parce qu’il n’a aucun doute sur l’identité de l’expéditeur.

Alors il se lance, fouiller sa mémoire, chercher un indice, impliqué des complices, découvrir la vérité sur cette femme à qui il n’a même pas dit aurevoir, inconscient qu’il était qu’elle partait pour de bon.

Dans cette Amérique futuriste, qui survit dans le PACT, un règlement politique prônant la citoyenneté, la loyauté au drapeau et aux valeurs du gouvernement. Ce même PACT qui nourrit la peur de l’étranger, la surveillance et la délation, le retrait des livres antipatriotiques des rayonnages des bibliothèques et enlève des enfants à la garde de leurs parents au seul motif que ces derniers ne seraient pas de bons américains.

C’est un État qui fait peur, un État qui a peur, un État qui se nourrit et se relève grâce à la peur… Mais quand la confiance revient, la peur doit reculer, quoiqu’il en coûte.

« Auteur » signifiait à l'origine « celui qui fait croître» : quelqu'un qui cultivait une idée jusqu'à maturité, récoltant des poèmes, des histoires, des livres. »

Encore un roman dystopique, encore une histoire post/apocalyptique, encore une couverture et un titre qui m’ont attirée dans un univers dans lequel je ne me serais certainement pas plongée en connaissance de cause.

J’ai trouvé dans Nos cœurs disparus, une petite touche de La servante écarlate de Margaret Atwood, une petite touche de Fahrenheit 451 , une petite touche de la série Sweet tooth et une grosse louche d’humanité.

C’est malheureusement le portrait d’une société qui pourrait advenir si aucun d’entre nous ne résiste à l’ignominie et à la barbarie, si tout le monde cède à la peur. Parce que c’est la peur, en plus de la faim, qui pousse parfois les êtres à commettre le pire, ou tout simplement, à l’accepter, à baisser les yeux et à continuer sa route comme si de rien n’était.

J’ai été perturbée par cette lecture qui décrit malheureusement quelque chose qui pourrait arriver. L’écriture est fluide et brillante, simple aussi, rendant hommage aux livres, aux mots, aux bibliothèques et aux bibliothécaires. L’auteure souligne une multitude de choses contre lesquelles il faut se prémunir : la haine de l’étranger, le repli sur soi, l’aveuglement. Il reste heureusement des gens courageux, des gens comme Margaret, qui se découvrent forts quand la sécurité de leurs enfants est en péril. Des gens qui ouvrent les yeux et s’accrochent à des convictions humanistes, qui nous permettent de garder espoir.

C’est un roman à lire, pour continuer d’aimer son prochain, vraiment. Pas seulement celui qui nous ressemble. Comme dirait Metin Arditi : « Aimer son prochain comme soi-même, mais aussi son lointain… »


«… le temps pouvait être fuyant et élastique quand il concernait votre enfant, paraissant avancer non pas en ligne droite mais en boucles perpétuelles, revenant sans arrêt sur lui-même, tournant en rond. »
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